Les catégories de cliniques.
D'une façon générale, les cliniques sont mal connues tant du public que de l'administration centrale qui n'était théoriquement compétente que pour l'hospitalisation publique jusqu'à la l'élargissement des compétences de la Direction des Hôpitaux (DH) devenue "Direction de l'Hospitalisation et de l'Organisation des Soins" (DHOS) au détriment des trois Caisses Nationales d'Assurance-Maladie.
A coté des cliniques de moyen séjour (convalescence, rééducation fonctionnelle, psychiatrie) et de long séjour (gériatrie), dont personne ne conteste l’utilité, tout en en déplorant au contraire le nombre insuffisant et les capacités réduites, ce sont les cliniques du type M.C.O. de court séjour qui sont l’objet de controverses entre hospitaliers publics (salariés sous statuts) et libéraux (rémunérés à l’acte sous convention).
Les dimensions de l’établissement.
Les cliniques sont restées à l’échelle humaine (de 60 à 150 lits en moyenne) contrastant avec le gigantisme de certains établissements publics. Le personnel est calculé au plus juste : en particulier, la gestion administrative est réduite à l’essentiel tandis que le personnel soignant se borne aux ratios officiels quand il ne les dépasse pas.
Les relations
Les relations entre malades, médecins, soignants, employés et gestionnaires sont en général personnalisées et constituent un des principaux atouts de l’hospitalisation privée. Les cliniques commerciales n’ont connu en 50 ans que de très rares grèves, d’ailleurs purement symboliques.
La greve 
Par la suite, devant l'attitude systématiquement préférentielle des pouvoirs publics en faveur de l'hospitalisation publique au détriment des cliniques privées, quelle que soit la majorité politique au pouvoir, et face à l'étranglement financier progressif des cliniques, elles ont du se résoudre, malgré les risques, à se lancer à deux reprises, les 24 et 25 Octobre 2001 (avertissement) et du 5 au 7 novembre 2001 (avec l'aide des coordinations de spécialistes) dans un mouvement de contestation de la dernière chance pour obtenir une légère augmentation de leur allocation de ressources, destinée simplement à retarder l'échéance finale…!
Le caractère libéral
Le caractère libéral de la médecine de clinique comporte
  • l’indépendance professionnelle du praticien qui, contrairement à l'hôpital, n’est soumis à aucune hiérarchie tant médicale qu'administrative, sauf celle de la loi 84-5 du 3 janvier 1984, discrètement atténuée par son art. 7 obtenu de haute lutte par le Président VILLEY.

  • le libre choix du praticien par le malade

  • la responsabilité directe du praticien à l’égard de son malade et par voie de conséquence, des membres de l’équipe qui l’entoure : anesthésiste, biologiste, radiologue, infirmière, kinésithérapeute, etc... pouvant même impliquer celle du gestionnaire.

Le praticien libéral demeure soumis à un certain nombre de contraintes réglementaires, conventionnelles et tarifaires, sans parler de la concurrence parfois très vive entre les praticiens eux-mêmes, surtout dans la même spécialité.
Il est absurde de prétendre comme certains A titre d'exemple d'une opinion largement répandue chez les "décideurs", il m'a paru utile de citer M. Jean Marc SIMON, ancien directeur du Plan à l'A.P. de Paris et membre de plusieurs commissions du IVème Plan – Santé sur la progression des facteurs de"différenciation" et de "cloisonnement" entre les médecins des hôpitaux et ceux des cliniques :

"C'est à peine caricaturer la réalité que de dire que le système actuel attribue à ceux qui restent à l'hôpital le monopole de l'enseignement et des communications savantes, et à la majorité de ceux qui vont dans les cliniques le privilège des très hauts revenus. Ce clivage n'est pas sain et le droit reconnu aux médecins hospitaliers d'exercer une activité privée, loin d'en atténuer les effets, introduit un élément de confusion supplémentaire.

"Mais il faudrait également harmoniser les rémunérations. Les émoluments des médecins qui exercent à plein-temps dans les hôpitaux publics sont suffisants pour leur permettre, même sans l'exercice d'une activité privée, de bénéficier de l'indépendance nécessaire. C'est vers ce niveau que devrait se faire l'harmonisation. En éliminant les rémunérations excessives dans le secteur de la santé, on gommerait définitivement ce qui, plus que leur forme juridique, sépare les hôpitaux publics et les cliniques privées" (extrait du Figaro du 18 février 1977)
  que la situation morale et surtout matérielle des praticiens exerçant en clinique est particulièrement et uniformément attractive au point d'expliquer la fuite des hospitaliers publics vers le secteur privé libéral.
Une gestion vigilante
Fondé sur le maintien à tout prix d’une rentabilité même très faible de l’établissement, le contrôle permanent de chaque poste permet de déceler immédiatement la moindre anomalie et d’y porter remède sans délai sur simple décision du responsable : maintenance du matériel, gestion du personnel (peu ou pas d’absentéisme) et des réserves de produits consommables.
Chaque établissement privé informatisé a désormais sa propre comptabilité analytique. La moindre défaillance peut conduire un établissement à sa perte. A l’opposé, un établissement bien géré peut améliorer son potentiel technique et investir - parfois même par simple auto-financement - dans des secteurs nouveaux, si toutefois il réussit à obtenir les autorisations nécessaires… tant l’administration se montre particulièrement sourcilleuse lorsqu’il s’agit d’un investissement privé alors qu’elle ne refuse pratiquement jamais une demande analogue lorsqu’il s’agit d’un établissement public, lui facilitant même son financement !
Une souplesse d’adaptation
Les progrès techniques rapides imposent, tant dans le domaine médical que dans celui de l’hôtellerie ou de la restauration une remise à jour périodique. Rapidement évalués par l’amélioration ou le confort supplémentaire qu’ils sont susceptibles d’apporter, les nouveaux équipements sont rapidement adoptés et mis en service sans délai.
Par contre, l’hôpital public soumis à une réglementation pesante ne dispose que bien rarement d’une telle liberté…
Un changement dans la clientèle ou l’environnement professionnel, l’opportunité d’une fusion avec un établissement voisin peuvent conduire une clinique à changer sa stratégie d’entreprise. Mais les décisions qui naguère auraient du être prises directement par les responsables concernés et dans des délais compatibles avec le but recherché, ne le sont plus guère que par le représentant de l’Etat, en l’occurrence le Directeur de l’Agence Régionale de l’Hospitalisation, avec plus ou moins de bonheur sur le résultat escompté.
Les coûts
La comparaison des coûts respectifs des hospitalisations publique et privée pour des actes identiques a été souvent tentée mais sans résultat probant jusqu’à ce que l’administration se décide enfin à entreprendre l’étude prescrite depuis la loi EVIN du 31 juillet 1991, confirmée par celle de la CMU sur la tarification par pathologie.
Dans le domaine de la chirurgie courante, le simple rapprochement des trois facturations (publique, PSPH et privée libérale) avait montré depuis bien longtemps que la dernière était au minimum moins onéreuse d’un tiers que les deux autres. L’expérience Languedoc-Roussillon et la commission MAROT ont confirmé cet écart de coûts et même certains travaux – non publiés – ont révélé des différences encore plus importantes…
On comprend pourquoi l’administration n’était pas très empressée de faciliter ces études.
La structure et le financement
A l’origine, la clinique privée était en général constituée par un bâtiment (hôtel particulier, vaste demeure dite bourgeoise, entourée si possible de terrain) appartenant à un médecin spécialiste, souvent un chirurgien, parfois un radiologue.
Aujourd’hui, presque toutes les cliniques privées sont constituées par deux sociétés :
  • une SCI représentant le ou les bâtiments et le terrain et dont le chirurgien, sa famille, son ou ses associés possèdent en proportion variables les parts sociales.

  • une Société d’exploitation à laquelle participent un certain nombre d’actionnaires dont le chirurgien et un certain nombre de praticiens qui ont acheté des parts au moment de leur entrée dans l’établissement. Cette Société paye un loyer annuel à la SCI. Les fonds propres dont elle dispose sont ceux tirés de sa gestion. Ils sont par définition, insuffisants pour tout investissement important.

Si un appel de fonds auprès des actionnaires médecins par augmentation du capital social est rarement possible, la Société d’exploitation comme la SCI doivent donc recourir à l’emprunt toutes les fois qu’une modification est décidée.
Les banques sollicitées ont généreusement accordés les crédits nécessaires pendant toute la période d’extension des cliniques. Dans la période de crise actuelle, les banques se montrent beaucoup plus réticentes et demandent des garanties sérieuses dont la plus importante demeure la réputation de l’établissement surtout dans les petites villes. Le coefficient de remplissage, la qualité professionnelle des praticiens, la solvabilité du responsable qui a engagé souvent son patrimoine personnel et parfois même celui de ses proches, et la façon dont il a remboursé des prêts antérieurs constituent autant d’éléments d’appréciation du banquier.
Contrairement à une idée reçue que j’ai moi-même entendue de la part de hauts responsables, la Sécurité Sociale n’intervient à aucun moment dans le financement d’une clinique privée, sauf à procéder à des avances à valoir sur les remboursements attendus par la clinique pour ses prestations effectuées en faveur des assurés. Par contre, l’hôpital public a souvent bénéficié du soutien financier de l’Assurance-maladie à différents stades, notamment en puisant sur les fonds de l’action sanitaire et sociale.
Le financement d’une clinique privée ne dépend donc, ni de près ni de loin de la puissance publique ni de l’Assurance maladie, sauf dans quelques établissements gérés par l'Assurance maladie, comme le Centre Marie-Lannelongue.
C’est précisément pour pallier les insuffisances de trésorerie des cliniques privées que des groupes financiers ont cherché à investir dans un secteur considéré comme prometteur en pénétrant dans le capital de l’établissement ou en le reprenant purement et simplement dans des conditions avantageuses à l’occasion d’un dépôt de bilan.
J’ai assisté à plusieurs opérations de ce type lorsque la valeur du terrain permettait à elle seule de construire un immeuble de luxe en faisant disparaître une clinique, instrument de travail de plusieurs spécialistes pratiquement ruinés et en mettant au chômage un personnel compétent et dévoué… Dans la seule Région parisienne (devenue aujourd'hui Ile de France) pendant l'été 1974, 7 cliniques chirurgicales et 5 autres pendant l'été 1975, ont cessé d'exister. En 1950, la commune de Neuilly sur Seine comptait 16 cliniques privées. Depuis 1985, il n'en reste plus que 4 !  
On peut affirmer qu’en 1999, la rémunération du capital investi dans une clinique privée n’existe pratiquement plus.
Depuis 30 ans, aucune clinique, sauf rarissime exception, ne distribue plus de dividendes. Si elle dégage en fin d’exercice un solde bénéficiaire, il est automatiquement affecté à un investissement probablement urgent en personnel ou en matériel.
En achetant des parts, le praticien s’est borné à acheter seulement le droit d’exercer en investissant dans son outil de travail. Son véritable intéressement consiste à donner à sa clientèle personnelle, une qualité de services susceptible de l’accroître et du même coup, sa valeur patrimoniale, si par contrat elle est transmissible. Cette éventualité est de plus en plus exceptionnelle.