Commencé en 2000, ce recueil de souvenirs professionnels s'achève en juillet 2008.
Je me suis borné à évoquer les points les plus saillants de mes activités pendant la partie du XXème siècle, celle des grandes réformes sociales, de l'enseignement et de l'exercice médical, des progrès scientifiques et de l'explosion des budgets correspondants.
Je m'en tiendrai à une chronologie condensée.
La loi de 1941 suivie du R.A.P. du 17 avril 1943 a rénové les structures hospitalières désormais ouvertes aux premiers assurés sociaux de 1930. Peu après la Libération, en 1945, un système de couverture sociale fondé sur la Solidarité se met progressivement en place.
A l'avènement de la Vème République, en 1958/1960, deux Réformes importantes sont instituées par Ordonnances :
  • un régime conventionnel souvent remanié depuis le 12 mai 1960 surmontera plusieurs crises mais son équilibre financier toujours précaire s'imposera dès la constitution du prochain gouvernement de la future République.
  • la Réforme Hospitalière et Universitaire inspirée par le Pr. DEBRE, généralise le plein-temps en séparant progressivement la médecine de ville de la médecine hospitalière.
 
On dispose à ce jour d'un recul suffisant pour juger objectivement les effets de ces deux grandes réformes. Les Ordonnances JUPPE d'avril 1996 tant décriées mais scrupuleusement appliquées par tous les gouvernements successifs, apportent plusieurs solutions transitoires à une situation devenue inextricable.
Pour ma part, l'amorce d'un rapprochement entre les deux types d'hospitalisation publique et privée avec le maintien d'un secteur public à temps partiel, me paraissent constituer les éléments les plus réalistes et les plus prometteurs pour redresser la situation.
Mai 1968. 10 ans à peine après l'avènement de la Vème République et un gouvernement considéré comme fort, tout bascule. Le spectacle de la Sorbonne annonce un changement rapide et profond de la société dite de consommation. Les premières voitures incendiées au Quartier Latin annoncent les milliers qui suivront, les grèves, les mécontentements d'un grand nombre de secteurs professionnels, les ravages d'un chômage en progression constante mais qu'on dénombre mal. De même, on évalue très approximativement les bilans comptables de l'Assurance-maladie ou le nombre d'attachés des hôpitaux en fonction regroupés, pour la commodité, en "équivalents temps plein".
Autrefois, la vénérable Banque de France publiait régulièrement un point financier précis permettant de suivre clairement l'évolution des principaux flux financiers nationaux. La Sécurité Sociale se contente de produire des estimations ou des prévisions voire des déficits globaux sans ventilations ni explications crédibles.
1970 à 1980. A quelques mois des désordres, on est passé brusquement du transistor tenu à l'oreille à la généralisation de l'informatique, au téléphone portable et à l'ordinateur. La mondialisation vient d'apparaître. D'économique, elle est devenue écolo-humanitaire, véhiculant des idéologies nouvelles induisant un changement des mentalités et des comportements.
1980. Grâce aux nombreux progrès techniques, la consommation de soins, la longévité mais aussi les dépenses du secteur médico-social ont considérablement augmenté. Un chirurgien libéral lyonnais invente la chirurgie sous coelioscopie que les américains qualifient de « second french revolution ! »"
Les pouvoirs publics, obsédés par la croissance des coûts, réduisent la démographie médicale dans l'espoir de réduire les prescriptions en les incitant même les médecins à partir en retraite avant l'heure..
En retardant les revalorisant tarifaires, surtout la valeur de la lettre clé KC des chirurgiens, ils amorcent le déclin de la chirurgie mais finissent par accepter d'ouvrir la soupape tarifaire du secteur 2. Certains excès restreignent son usage en ville mais sans limiter les dépassements du secteur privé des PU-PH et des PH à plein temps…
Le dogme de la rémunération à l'acte longtemps considéré comme la garantie d'un exercice libéral commence à perdre du terrain au profit d'un système forfaitaire proche du salariat d'une médecine d'équipe concourrant au traitement d'une pathologie en garantissant la permanence des soins. Entre le simple renouvellement d'une ordonnance et un certificat d'arrêt ou de reprise de travail, une recto-colectomie effectuée par une équipe spécialisée ne peut pas être classée et évaluée dans la même catégorie d'actes.
1984 Le retard de plusieurs mois pris par la publication du décret instituant la départementalisation hospitalièr, prévu le 12 juillet 1984 lors du changement de Premier Ministre, fut mis à profit par ses adversaires et est probablement à l'origine de l'échec d'une réforme qui aurait préservé l'hôpital public des crises successives qu'il traverse encore. Petite cause, grands effets.
2004 La création d'un Conseil de la chirurgie révèle une prise de conscience bien tardive des pouvoirs publics restés sourds aux doléances d'une spécialité sur le déclin.
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A l'heure des nano-technologies et des découvertes prodigieuses apportées par l'exploration de l'Univers, notre système de protection sociale est conçu depuis l'origine sur le principe de Solidarité selon un monopole, exercé sur une population captive, dont le budget a dépassé celui de l'Etat.
Sa gestion lourde et complexe repose sur une redistribution des revenus et des transferts sociaux mesurés par des statistiques souvent controversées. Elle devrait retrouver les principes de l'assurance individuelle et de la libre concurrence et s'adapter aux méthodes modernes de gestion. On sait déjà que le secteur médico-social va prendre une place de plus en plus large dans l'économie mondiale, en partie du fait de l'irruption brutale de l'écologie dans la lutte contre les catastrophes naturelles.
Mais surtout, un retour de la confiance entre l'administration et les administrés serait préférable aux conflits engendrés par des soupçons réciproques. Le respect d'une signature, d'un engagement, d'une promesse éviteraient beaucoup de malentendus, voire de recours devant les juridictions compétentes.
Depuis François BILLOUX en 1944, je crois bien avoir rencontré tous les ministres (ou leurs collaborateurs les plus directs), sauf un, Léon SCHWARTZENBERG dont le mandat ministériel (9 jours) ne lui avait pas laissé le temps de nous fixer rendez-vous…
Certains par contre nous ont laissé un grand souvenir :

M Jean-Marcel JEANNENEY pour sa connaissance parfaite des dossiers médico-sociaux en 1967, dans le gouvernement POMPIDOU,

Mme Simone VEIL en 1974 (gouvernement CHIRAC), en 1976 (gouvernement BARRE) et en 1988 (gouvernement BALLADUR),

M. Jacques BARROT en 1981 (gouvernement BARRE), qui nous a accordé notre première représentativité,

Le Dr Bernard KOUCHNER, qui à trois reprises s'est penché sur nos dossiers et qui nous a restitué notre représentativité en 1998.