Thèsé le 25 avril 1945, démobilisé en janvier 1946, je préparais comme tous mes camarades d'externat les concours d'internat 1946 : je fus nommé la même année à quelques semaines d'intervalle "10ème provisoire" à l'A.P. de PARIS et 16ème titulaire à la REGION. Je choisis simultanément les deux filières, ce qui était possible à cette époque avant leur fusion qui n'interviendra que bien plus tard, en 1962 ! Après une fructueuse formation en gynécologie-obstétrique à la maternité de l'Hôpital de St DENIS (Dr de Peretti della Rocca) puis à celle de l'Hôpital St-Antoine (Pr LACOMME), je fus interne dans 3 services de chirurgie particulièrement actifs chez René SAUVAGE (St Denis), G. METIVET (Créteil) dont j'avais déjà été l'externe à Tenon en 1941, chez J.P. LAMARE (St-Germain en Laye) et enfin chez Jean BRAINE à Neuilly, établissement que je ne quitterai qu'à ma retraite le 31 décembre 1985.
Ayant effectué depuis 1947 plusieurs remplacements de chirurgie en province, j'eus la chance d'être retenu à la clinique Ste Odile, une des toutes premières cliniques conventionnées de NEUILLY par le Dr Arnaud BRUNET dont je rappellerai le souvenir à plusieurs reprises et dont je m'honore d'avoir été l'élève. Par un heureux concours de circonstances, j'avais ainsi réalisé à la sortie de l'internat, le rêve de tout chirurgien : un exercice mixte à la fois hospitalier et en clinique privée à proximité immédiate de mon domicile, à deux pas de la Faculté !
Tout en ayant déjà une certaine expérience grâce à cette double activité sur 2 sites complémentaires par leur diversité et leur réputation, j'avais mesuré sans complaisance les limites de ma formation chirurgicale de base au milieu d'une clientèle déjà nombreuse, fidèle mais plus exigeante dans un secteur que dans l'autre. Profitant des facilités offertes par la proximité, je devins un auditeur assidu des séances de l'Académie de chirurgie alors rue de Seine, jouxtant la Coupole de l'Institut. Je me tenais toujours sur l'un des deux bancs réservés au public, au fond de la petite salle. Malgré l'inconfort du lieu, j'ai beaucoup appris en écoutant les Maîtres de la chirurgie française soumettant leur expérience et leurs recherches aux critiques - parfois vives - de leurs Collègues. Je me souviens encore de la fameuse séance où LE CHUITON, chirurgien de la marine, fut vertement apostrophé par un Robert JUDET très en verve, à propos d'une nouvelle technique de traitement sous-cutané de la maladie de Dupuytren !
La Faculté organisait périodiquement des cours de technique chirurgicale soit rue du Fer à Moulin, soit rue de l'Ecole de Médecine. Pendant plusieurs années, je me suis efforcé d'y assister. Introduit par mon Maître le Professeur Argégé Jean BARCAT, j'ai participé aux lundis après-midi des Enfants-Malades pour entendre le Pr. Marcel FEVRE, Jean JUDET, Denys PELLERIN, Mme FEKETE, BIENAYME et toute son équipe.
Abonné à bon nombre de publications, j'emportais chaque année celles que je n'avais pas encore lues et au temps où je prenais encore des vacances, je découpais sur la plage les articles qui me paraissaient les plus utiles. Enfin, je participais régulièrement aux Congrès de Chirurgie organisés par l'A.F.C. depuis mon parrainage par le Pr Charles DUBOST - mon ancien conférencier d'internat - dont j'étais particulièrement fier.
Pendant toute ma carrière et même encore aujourd'hui, je n'ai jamais manqué une occasion d'enrichir ma F.M.C. personnelle. Je dois reconnaître que j'aurais été impardonnable de ne pas profiter de ma situation privilégiée.
A 50 ans, je saisis une opportunité et je décide de concourir à l'assistanat de chirurgie des Hôpitaux d'Ile de France
Attaché d'urologie puis de chirurgie osseuse depuis 1952 à l'Hôpital de Neuilly, j'exerçais en fait les fonctions d'assistant à temps partiel en chirurgie générale tandis que le plein-temps commençait à se généraliser depuis 1961. J'apprends un beau jour de 1969 qu'un concours régional d'assistants à temps partiel, le premier depuis 1958, serait ouvert pour pourvoir quelques postes de chirurgiens titulaires dans des Centres Hospitaliers de la « première couronne », comme on disait alors. A cette époque, tout concours hospitalier public comportait 6 épreuves (vous avez bien lu 6 !).
 

Admissibilité :

  • deux épreuves écrites anonymes d'une durée de 2 heures chacune, cotées de 0 à 20, l'une d'anatomie avec éventuellement une partie de physiologie, l'autre de pathologie chirurgicale comportant obligatoirement une partie thérapeutique.

Admission :

  • une épreuve de titres et travaux cotée de 0 à 20 et deux épreuves cliniques écrites cotées chacune de 0 à 20 sur malade atteint d'affection chirurgicale (pour chaque épreuve, 20 minutes d'examen, 45 minutes de rédaction puis lecture par le candidat devant le jury).

  • une épreuve de médecine opératoire cotée de 0 à 20 portant sur une découverte d'organe, une amputation, une résection articulaire ou une désarticulation.

Le concours fut ouvert en Novembre 1970. Je devais saisir cette dernière opportunité mais vu mon âge et la difficulté de ce type de concours, mes chances me parurent bien minces. Je me mis à travailler d'arrache-pied, me replongeant dans une anatomie bien lointaine, allant répéter sur le cadavre les gestes essentiels. Mes 9 concurrents (pour 5 postes) étaient tous bien plus jeunes que moi et donc encore proches de leurs questions.
A ma grande surprise, je me suis assez bien comporté pendant ce concours et mais j'ai toujours pensé que je devais mon rang de major à un jury présidé par Henri LE BRIGANT, le déjà célèbre chirurgien thoracique, qui avait pratiquement le même âge que le mien !
Grâce à ce concours, je pus choisir le poste de NEUILLY que par prudence j'avais inscrit seul. C'est ainsi que je fus par la suite désigné comme adjoint puis intégré comme PH à temps partiel avec le titre de « chirurgien des hôpitaux ».
Je surprends toujours la génération actuelle lorsque j'évoque la solennité et les difficultés des concours d'autrefois ...!